À moins de trois semaines du scrutin présidentiel du 25 octobre, le paysage politique ivoirien connaît une nouvelle reconfiguration. Le Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des peuples (COJEP), formation politique dirigée par Charles Blé Goudé, a désigné ce samedi Simone Ehivet Gbagbo comme sa candidate à la magistrature suprême, lors d’une Convention nationale extraordinaire tenue à la Fondation Félix Houphouët-Boigny de Yamoussoukro.

Quatre candidats étaient en lice pour obtenir l’investiture du COJEP : Simone Ehivet Gbagbo, Ahoua Don Mello, Henriette Lagou Adjoua et Jean-Louis Billon. Sur 165 votants sur 202 inscrits, le verdict des urnes est sans appel. Simone Gbagbo : 127 voix (77%), Ahoua Don Mello : 31 voix (19%), Henriette Lagou : 1 voix (1%) et Jean-Louis Billon : 0 voix (0%)

Le dépouillement, effectué en toute transparence, s’est déroulé sous le regard attentif d’un commissaire de justice. Ce choix marque un tournant stratégique pour le COJEP, qui, dans la foulée, a annoncé l’ouverture d’une procédure de suspension de sa participation à la CAP-CI, coalition à but non électoraliste, jugée peu compatible avec l’objectif immédiat de conquête du pouvoir.

Prenant la parole devant une salle comble, Charles Blé Goudé a livré un discours puissant, alternant lucidité politique, mobilisation militante et confession personnelle.

"Vous venez de poser un pas vers la démocratie. Ce que vous avez fait ici, c’est historique", a-t-il déclaré en saluant le choix de la base pour une candidature portée par une figure emblématique de l’histoire politique ivoirienne.

L’ancien ministre, aujourd’hui radié des listes électorales, a assumé sa non-candidature avec dignité, affirmant: "Je ne suis pas un marchand de larmes. Je connais une seule chose : le devoir."

Blé Goudé a aussi profité de cette tribune pour rappeler le parcours du COJEP, qu’il qualifie de parti forgé dans l’adversité, par contraste avec les grandes formations historiques comme le PDCI, le FPI, le PPA-CI ou le RHDP.

"Nous ne sommes pas des héritiers. Nous sommes en train de forger notre parti, pierre par pierre, avec nos mains, notre sueur, dans les larmes parfois. Mais nous avançons", a-t-il lancé, galvanisant ses troupes.

Revenant sur les chiffres de la participation électorale des dernières années, Blé Goudé a souligné l’enjeu de la mobilisation. 2010 : 5,7 millions inscrits, 4,8 millions votants. 2015 : 6 millions inscrits, 3 millions votants. 2020 : 7,5 millions inscrits, 3,2 millions votants. Et 2025 : près de 8,7 millions d’inscrits, mais 4 à 5 millions d’abstentionnistes redoutés.

"Ce ne sont pas les listes électorales qui décident des résultats, c’est la mobilisation", a-t-il martelé.

Bien qu’il ait salué le respect dû à Ahoua Don Mello, Charles Blé Goudé s’est engagé à œuvrer pour rapprocher les deux personnalités, dans une volonté affichée d’unité au sein de l’opposition : "Ma volonté personnelle doit s’effacer devant votre volonté démocratique."

Blé Goudé s’est déclaré pleinement engagé derrière la candidature de Simone Gbagbo, qu’il considère comme un "choix démocratique et stratégique", soulignant qu’un vote d’adhésion et non de colère sera la clé pour changer le destin de la Côte d’Ivoire:"Faisons de nos espoirs des choix, pas de notre colère une punition."

Avec cette investiture, le COJEP entre résolument en campagne. Reste à voir si la dynamique impulsée à Yamoussoukro saura mobiliser les abstentionnistes et fédérer au-delà du parti. 

Une chose est sûre : Simone Gbagbo bénéficie désormais d’un appui de poids, et Charles Blé Goudé entend bien peser dans le débat, même en l'absence de candidature personnelle.

Wassimagnon