

Cameroun : Crise financière à l'université, les enseignants de Douala décrètent l'arrêt des activités dans les amphithéâtres
La Faculté des lettres et sciences humaines de l'Université de Douala s'apprête à vivre un arrêt total de ses activités. Face à des années d'impayés et au mutisme de leur hiérarchie, les enseignants brandissent l'arme de la grève illimitée dans un bras de fer financier qui révèle les dysfonctionnements chroniques du système universitaire camerounais.
Après les secousses d'avril dernier qui avaient secoué l'ensemble du secteur éducatif, c'est au tour de l'Université de Douala de connaître un épisode de tensions. La section locale du Syndicat national des enseignants du supérieur (Synes) a choisi l'offensive frontale face à une administration jugée sourde à leurs réclamations légitimes.
Exaspération
La décision de déclencher un mouvement de grève sans limitation de durée à partir du 11 juin 2025 ne relève pas de l'improvisation. Elle constitue l'aboutissement d'un processus de revendication entamé depuis plusieurs mois, marqué par une succession de démarches restées sans écho favorable.
La session syndicale du 30 mai dernier a sonné comme un ultimatum après des semaines d'attente infructueuse. Malgré un préavis de grève déposé le 14 avril précédent, l'administration universitaire a maintenu un silence obstiné face aux doléances exprimées par les représentants du personnel enseignant.
Créances
L'ampleur financière du contentieux demeure un mystère que les syndicalistes déplorent amèrement. Les prestations impayées s'accumulent sur plusieurs exercices budgétaires, créant un arriéré dont l'évaluation exacte échappe aux principaux intéressés.
Les revendications portent sur des montants substantiels : la seconde tranche des primes internes de l'année académique 2023-2024, l'intégralité de la première tranche pour l'exercice 2024-2025, ainsi que l'apurement complet des dettes relatives aux filières professionnelles sur trois années consécutives, de 2021 à 2024.
Système opaque
Cette situation kafkaïenne révèle les défaillances structurelles de la gouvernance financière universitaire. Le Dr Roméo Damase Tchanga, porte-parole des enseignants contestataires, dénonce cette opacité qui prive les créanciers de toute visibilité sur leurs droits financiers.
L'architecture administrative actuelle confère au service financier de l'université un monopole informationnel que les syndicats jugent inadmissible. Cette centralisation excessive des données budgétaires alimente les frustrations et complique dangereusement le dialogue social.
Les prestations concernées par ces impayés ne relèvent pas d'activités marginales. Jurys de Master, heures supplémentaires d'enseignement, missions académiques, surveillance d'examens et animation des filières professionnelles constituent le cœur même de la vie universitaire.
Cette situation paradoxale transforme l'engagement professionnel des enseignants en travail bénévole imposé, remettant en question la viabilité financière de leur investissement pédagogique et académique.
Échec du dialogue
La responsabilité de cette crise ne saurait être imputée aux seuls services centraux de l'université. Les syndicalistes pointent également l'inaction du décanat de la faculté en matière de médiation sociale. Cette défaillance du dialogue de proximité a contribué à l'envenimement d'un conflit qui aurait pu trouver des solutions négociées.
L'absence d'initiatives décanales pour désamorcer les tensions témoigne d'une conception hiérarchique dépassée des relations sociales universitaires, où l'autorité administrative se substitue au management participatif.
La levée du mot d'ordre de grève obéira à des procédures démocratiques rigoureuses que les dirigeants syndicaux ont d'ores et déjà précisées. Seule une assemblée générale ordinaire de la section syndicale, consécutive à des décisions concrètes du corps enseignant, pourra mettre fin à ce mouvement de protestation.
Des maux de l’université camerounaise
La crise à l’université de Douala s'inscrit dans un contexte national préoccupant pour l'enseignement supérieur. Les difficultés budgétaires chroniques des universités d'État, aggravées par une démographie étudiante galopante et des ressources publiques contraintes, génèrent des dysfonctionnements récurrents.
L'épisode de la FLSH de Douala fait écho aux revendications nationales du secteur éducatif, notamment celles portées en avril par le Collectif des organisations des enseignants autour de la refondation du système scolaire camerounais.
-Armand Ougock, correspondant permanent de Koaci au Cameroun.
-Joindre la rédaction camerounaise de Koaci au 237 691154277-oucameroun@koaci.com

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