Saint Désir Atango (Ph) 

L'ex-artiste Saint Désir Atango justifie ses actes par des convictions spiritualistes controversées.

L'ancien musicien Saint Désir Atango Atango, connu dans le milieu du bikutsi, se trouve désormais derrière les barreaux de la prison principale de Mfou, aux côtés de sa fille biologique Atangana Nga'Ottou, qui vient de donner naissance. Les deux sont inculpés dans une affaire d’inceste et de viol aggravé qui secoue l'opinion publique camerounaise.

Croyances religieuses

Face aux accusations, la jeune femme maintient fermement sa position devant le procureur de la République près les tribunaux de Mfou. Elle affirme que selon leurs pratiques religieuses, son père représente son « premier époux ». Malgré les tentatives de sensibilisation de l'entourage familial, elle persiste dans cette conviction qu'elle considère comme légitime.

Le nourrisson né de cette union a été confié aux soins de sa grand-mère paternelle, sur décision des autorités compétentes. Une autre fille de l'accusé, qui porte plainte dans cette affaire, comparaîtra en liberté lors de la prochaine audience fixée au vendredi 13 juin 2025.

Justifications

L’affaire Saint Désir Atango a pris de l'ampleur suite à la diffusion sur les plateformes numériques d'un compte-rendu d'interrogatoire où l'artiste, de son vrai nom Atangana Atangana Désiré, expose ouvertement sa philosophie. Loin de contester les faits reprochés, il les présente comme une démarche de « libération africaine » en opposition aux contraintes des religions traditionnelles.

Selon ses déclarations, certains interdits religieux auraient été imposés par les puissances coloniales pour maintenir les peuples africains dans la soumission. Il soutient que « ce que prohibent les cultes occidentaux n'est pas forcément répréhensible ».

Se présentant comme un « animiste radical », Saint Désir Atango défend l'importance de préserver la « pureté sanguine » dans la société. Il réfute catégoriquement l'accusation d'inceste au nom de ses convictions personnelles et établit des parallèles avec des figures religieuses. Dans sa logique, l'existence de sa descendance prouverait la légitimité divine de ses actes.

Ayant délaissé progressivement sa carrière musicale pour endosser le rôle de guide spirituel, il se proclame « messie du peuple africain ». Il encourage le continent à « retrouver ses origines pures » et invite les législateurs à repenser les lois en s'affranchissant des influences religieuses extérieures.

L'une des filles concernées, également mère d'un enfant de son père, a exprimé son soutien lors des interrogatoires menés par la gendarmerie du Centre à Yaoundé. "Il m'a donné un magnifique enfant et je ne comprends pas son arrestation", aurait-elle confié.

Elle insiste sur la notion de consentement évoquée par son géniteur, invoquant leurs croyances : « Nous n'avons jamais été contraintes. Ma sœur et moi étions d'accord. Dans notre foi, il représente notre premier mari. »

Indignation générale

 L'avocate Alice Nkom a exigé une intervention rapide du ministère public via les réseaux sociaux, précisant qu'il s'agit "non d'un simple désordre familial, mais d'une violation grave du droit pénal camerounais".

« Aucune doctrine, aucune croyance ne peut légitimer de tels comportements », insiste la juriste, qui exprime son « soutien inconditionnel à la mère des jeunes victimes, confrontée à l'horreur d'un père sans limites morales ».

La législation camerounaise demeure inflexible sur cette question. L'article 360 du Code pénal, applicable depuis juin 1967, sanctionne explicitement l'inceste en définissant les relations prohibées et les sanctions applicables. « La protection de l'enfance reste prioritaire », rappelle Maître Alice Nkom.

-Armand Ougock, correspondant permanent de Koaci au Cameroun.

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