Face à un déficit halieutique chronique, le gouvernement camerounais lance un ambitieux projet aquacole dans la vallée du Nyong. Objectif : réduire la dépendance aux importations et créer un nouveau pôle économique.

Les chiffres sont éloquents. En 2022, le Cameroun n'a produit que 225 200 tonnes de poisson contre une demande nationale estimée à 500 000 tonnes. Résultat : le pays doit importer massivement pour nourrir sa population, malgré une pêche artisanale maritime qui représente 79% de l'offre locale.

Cette équation déficitaire pousse aujourd'hui les autorités à miser sur l'aquaculture industrielle avec le lancement ce jeudi du projet Proaqui (Projet Complexe Aqua-Industriel Intégré de la Vallée du Nyong).

Partenariat public-privé

Porté par le groupe Zeideal SAS en collaboration avec le Comité de Développement de l'arrondissement de Mfou (CODAM), ce projet bénéficie d'un soutien financier de taille. L'État camerounais, la Banque de Développement des États de l'Afrique Centrale et la coopération brésilienne se mobilisent pour cette initiative stratégique.

Le complexe, implanté dans la vallée du Nyong à Mfou, s'étendra sur 4 000 hectares irrigués. Les promoteurs prévoient une production annuelle de 10 500 tonnes de maïs et 2 500 tonnes de soja, destinés à alimenter une chaîne de production intégrée.

L'originalité du projet réside dans son approche intégrée. Le complexe comprendra une unité industrielle de fabrication d'aliments pour poissons (5 tonnes/heure), une écloserie moderne capable de produire 10 millions d'alevins par cycle, et une unité de grossissement visant 12 000 tonnes de poisson par an.

Ces 12 000 tonnes représenteraient une augmentation de 15% de l'offre nationale actuelle et réduiraient le déficit national de 2,04% annuellement.

Mfou, futur pôle industriel

Le projet s'inscrit dans une transformation plus large de l'arrondissement de Mfou. L'État prévoit la construction d'un pont sur le fleuve Nyong à Ekombitié, le bitumage de routes stratégiques qui réduiront de 50 kilomètres le trajet Yaoundé-Sangmélima, et la densification du réseau électrique.

Cette modernisation des infrastructures positionne Mfou comme une future zone industrielle et commerciale, bénéficiant de sa proximité avec l'Aéroport International de Yaoundé-Nsimalen et le Port Autonome de Kribi.

Les retombées attendues sont considérables : formation de 1 000 aquaculteurs, installation de 500 entrepreneurs, création de 500 emplois directs et génération de 5 000 emplois indirects.

Pour une région en quête de développement économique, le projet Proaqui représente un pari sur l'avenir. Reste à concrétiser cette ambition qui pourrait faire du Cameroun un acteur majeur de l'aquaculture en Afrique centrale.

-Armand Ougock, correspondant permanent de Koaci au Cameroun.

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