Dans la région de la Bagoué, une effervescence particulière gagne les groupements féminins à l’approche du 10 août. Ce jour-là, la commune de Gbon accueillera la deuxième édition de la Journée de l’excellence féminine, une célébration devenue en peu de temps l’un des plus puissants symboles de la transformation sociale et économique portée par les femmes rurales de la région.

Salimata Dembélé-Diarra, figure de cette dynamique, mène la mobilisation avec passion. Cheffe de cabinet au ministère de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme, elle est aussi présidente de la Fédération des groupements et associations féminines de la Bagoué (FEGAF), qui compte aujourd’hui plus de 500 associations fédérées et un effectif dépassant les 50 000 membres. Sous son impulsion, la Journée de l’excellence féminine s’est imposée comme un rendez-vous de valorisation et de reconnaissance des efforts collectifs des femmes du milieu rural.

L’événement du 10 août ne sera pas une simple remise de trophées. Il s’annonce comme un manifeste grandeur nature du leadership féminin. Les performances agricoles des bénéficiaires d’un même appui seront évaluées, et les meilleures initiatives collectives récompensées. Derrière cette démarche se cache une philosophie claire : montrer que, dans des conditions égales, les femmes peuvent exceller, innover, et faire progresser leur communauté.

La FEGAF ne cesse de gravir les échelons depuis sa formalisation il y a trois ans. Mais sa structuration réelle, elle, remonte à plus d’une décennie, avec l’appui constant du ministre Bruno Nabagné Koné, Président du Conseil régional de la Bagoué. Sa vision : faire de la femme rurale un acteur économique à part entière. Résultat : plus de 100 millions de FCFA déjà investis par le Conseil régional dans des projets agricoles féminins. À ce soutien local s’ajoute celui de nombreuses institutions nationales et internationales, dont ONU Femmes, le PNUD, le ministère de l’Agriculture, sans oublier l’appui des mairies et de plusieurs partenaires privés.

Les résultats sur le terrain sont visibles. Là où l’exclusion était la norme, l’autonomie s’installe progressivement. Certaines femmes sont désormais propriétaires de motos, d'autres assurent la scolarité de leurs enfants et investissent dans les cantines scolaires. L’alphabétisation gagne du terrain, et les communautés se ressoudent autour d’une nouvelle dynamique portée par des femmes devenues actrices majeures de leur destin.

Pour Salimata Dembélé-Diarra, cette célébration traduit un changement profond, amorcé depuis une décennie. « Il y a dix ans, les femmes étaient invisibles. Aujourd’hui, elles sont debout, fières, et respectées dans leurs villages », confie-t-elle. Et l’ambition de la FEGAF ne s’arrête pas là. La prochaine étape, déjà amorcée, est la bancarisation des femmes rurales : une stratégie pour sécuriser les revenus, promouvoir l’épargne, et garantir une autonomie financière durable.

Cité en exemple dans plusieurs régions voisines comme le Bounkani, le Kabadougou ou encore le Worodougou, le modèle FEGAF séduit par son efficacité. Il bénéficie même de la reconnaissance officielle de la ministre de la Femme, preuve que cette organisation féminine née en Bagoué est aujourd’hui une référence nationale.

Le 10 août, à Gbon, ce ne seront donc pas seulement des femmes en fête que l’on verra, mais des battantes déterminées à écrire, ensemble, une nouvelle page du développement rural.

Jean Chresus, Abidjan