Côte d'Ivoire : Prolifération des écoles d'architecture, l'Ordre des architectes dénonce une « escroquerie académique » et alerte l'État
Le ton était grave, ce mardi matin, au siège de l’Ordre des architectes de Côte d’Ivoire (OACI), à Cocody. Face à la presse, le président de l’Ordre, Joseph Amon, entouré du vice-président Koupô Gnoléba et de la vice-présidente Martine Dacoury-Tablet, a livré un message clair et sans détour : la prolifération anarchique des écoles d’architecture menace la crédibilité de la profession et la sécurité du bâti en Côte d’Ivoire.
Dans un exposé précis et ferme, Joseph Amon a dénoncé ce qu’il qualifie d’« amalgame entretenu à dessein » par certains établissements privés. Selon lui, de nombreuses structures se présentent comme des écoles d’architecture sans en avoir ni la reconnaissance légale, ni les standards requis.
« Une école en architecture n’est pas forcément une école d’architecture », a-t-il martelé, regrettant que des individus « abusent de la bonne foi des jeunes et de leurs parents » en leur vendant des illusions académiques.
L’OACI tire la sonnette d’alarme : cette prolifération incontrôlée met en péril tout le système. Le diplôme d’architecte, a rappelé Joseph Amon, est un titre protégé par la loi, au même titre que ceux de médecin ou d’avocat. Il ne peut être délivré que par l’État, après un parcours rigoureusement encadré : trois années de licence, deux années de master d’État en architecture, et éventuellement un doctorat.
Le président de l’Ordre est allé plus loin, dénonçant un phénomène inquiétant : le “blanchiment d’études”.
« Si vous passez d’un établissement non reconnu à un autre agréé sans contrôle préalable, vous contribuez à blanchir un diplôme illégalement acquis. Ce mécanisme met en péril la crédibilité du système universitaire », a-t-il alerté, comparant ce procédé au blanchiment d’argent.
Selon lui, certains établissements exploitent le système LMD (Licence-Master-Doctorat) pour des fins purement mercantiles, oubliant que ce dispositif européen « n’a rien changé qualitativement au niveau de la formation des professions réglementées ».
Interrogé sur une éventuelle fermeture des écoles illégales, le vice-président Koupô Gnoléba, commandeur du Mérite de la Fonction publique, a précisé : « Ce n’est pas à nous de fermer les écoles. Notre rôle est d’alerter l’État et le public. Nous disons : voici les écoles reconnues, et voici celles qui ne le sont pas. C’est à l’administration de prendre ses responsabilités. »
Il a aussi mis en garde contre les pertes de temps et d’argent subies par les étudiants trompés : « Certains jeunes viennent à notre école après trois années d’études dans un établissement non reconnu, pensant faire une passerelle. Malheureusement, ils doivent tout recommencer depuis la première année. »
L’OACI exhorte l’État à préserver l’intérêt public en régulant strictement la formation en architecture. Elle plaide pour que l’enseignement privé soit cantonné à des segments non diplômants, afin d’éviter toute confusion sur le port du titre d’architecte.
« Toute école d’architecture privée doit être créée sur la base d’un cahier des charges consensuel avec l’Autorité administrative et l’OACI, dans le respect total des textes en vigueur », a insisté Joseph Amon.
Il a rappelé qu’à ce jour, seules deux écoles d’architecture sont officiellement reconnues en Côte d’Ivoire : l’École d’Architecture d’Abidjan (EAA) et celle récemment ouverte à l’Université de Bondoukou.
Le président de l’OACI a conclu en rappelant la mission essentielle de l’Ordre : protéger la qualité architecturale, déclarée d’utilité et d’intérêt publics par la loi.
« Nul ne peut se prévaloir impunément du titre d’architecte », a-t-il affirmé, visiblement déterminé à défendre, avec ses pairs, la dignité d’une profession trop souvent malmenée par la cupidité et l’improvisation.
Wassimagnon
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