Côte d'Ivoire – Burkina Faso : Aux confins du Bounkani, l'intrigante présence des VDP burkinabè
Volontaires pour la défense de la patrie
Aux confins du nord-est ivoirien, dans la région du Bounkani, l’équilibre fragile entre coexistence frontalière et affirmation de souveraineté connaît depuis plusieurs mois des secousses inattendues. Dans cette zone reculée où les villages s’enchevêtrent de part et d’autre d’une frontière, la présence d’auxiliaires de sécurité burkinabè, connus sous le nom de Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), alimente désormais une inquiétude grandissante.
Ces VDP, recrutés par Ouagadougou pour participer à la lutte contre l’insécurité dans le Sahel, sont signalés dans plusieurs localités frontalières. Leur proximité, parfois même leur incursion en territoire que la Côte d’Ivoire considère comme sien, a provoqué des épisodes de crispation. L’un des plus récents remonte au 24 août 2025 : six agents ivoiriens de la direction d’Aide et d’Assistance aux réfugiés et apatrides (DAARA), en mission de recensement à Kalan 2 près de Moussokantou, auraient été interpellés par des individus se réclamant de ces groupes. Depuis, le sort exact de ces agents suscite une attention particulière.
Moussokantou, village de la sous-préfecture de Tougbo, symbolise à lui seul cette zone de friction. Depuis février 2025, des VDP y affirment s’appuyer sur des données cartographiques pour revendiquer l’appartenance du territoire au Burkina Faso. Un discours aussitôt rejeté par Abidjan, qui y voit une atteinte directe à son intégrité territoriale. Sur le terrain, les populations, liées par des attaches familiales et culturelles transfrontalières, observent ces développements avec appréhension.
Ces incidents ne sont pas isolés. Déjà, entre 2023 et 2024, des patrouilles de gendarmerie ivoirienne avaient été confrontées à des situations analogues, désamorcées grâce aux canaux diplomatiques. La retenue des forces ivoiriennes, appelée à gérer ces épisodes délicats sans tomber dans la provocation, a jusque-là évité une escalade militaire.
Mais derrière ces accrochages se cache une réalité plus profonde : celle de frontières héritées de l’histoire coloniale, où chaque partie peut se prévaloir de relevés géographiques contradictoires.
Les autorités ivoiriennes, tout en réaffirmant fermement leur attachement à la souveraineté nationale, insistent sur la nécessité d’un dialogue renforcé avec Ouagadougou. Car au-delà des enjeux territoriaux, ce sont surtout la sécurité et la sérénité des populations frontalières qui se jouent. Ces communautés, prises en étau entre deux États frères, continuent de cultiver leurs terres et de commercer, rappelant que ce qui les unit reste bien plus fort que ce qui les divise.
Ainsi, dans le silence apparent des savanes du Bounkani, se dessine un enjeu stratégique majeur : préserver la paix par la concertation, avant que les frontières invisibles ne deviennent des lignes de fracture.
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