Gîte des orpailleurs clandestins à Prikro (Ph KOACI)

Depuis plusieurs années, la région de l'Iffou fait face à une grave menace : l'orpaillage illégal, une activité qui ne cesse de s'étendre malgré les efforts déployés par les autorités locales. Ce phénomène dévastateur, qui a entraîné la dégradation de l'environnement et perturbé la vie des populations locales, trouve ses racines dans la recherche effrénée de l'or par des groupes d'orpailleurs clandestins. La localité de Prikro, située à 72 km de Daoukro, n’échappe pas à ce fléau. Cependant, une avancée a été enregistrée dans la lutte contre ce phénomène avec l'arrestation de l'un des présumés principaux acteurs de cette activité illicite, un natif du village, connu sous le pseudonyme de K.K.D.

Le vendredi 13 septembre dernier, après plusieurs mois de traque et d’enquête minutieuse menée par la brigade de sécurité et de lutte contre l'orpaillage illégal, K.K.D a finalement été appréhendé à son domicile dans son village natal. Ce dernier, qui avait longtemps échappé aux autorités grâce à un réseau de complices bien établi, était considéré comme le principal financier des activités d'orpaillage clandestin dans la région. En effet, selon des sources locales, K.K.D ne se contentait pas seulement de financer ces activités illégales. Il en était également le grand bénéficiaire, collectant l'or extrait des sites qu'il finançait, pour ensuite le revendre à des acheteurs, notamment à Abidjan, la capitale économique.

Les autorités locales et les forces de l'ordre, bien conscientes de l'impact désastreux de l'orpaillage illégal, avaient redoublé d'efforts pour mettre fin à ce trafic. Les éléments de la maréchaussée opérant sous la direction des districts de police, avaient pour mission de traquer les orpailleurs clandestins et leurs complices. C’est dans ce cadre qu'une enquête de longue haleine a permis de remonter la piste de K.K.D, dont les activités illicites étaient devenues une véritable menace pour l’équilibre socio-économique de la région.

La stratégie de K.K.D était aussi ingénieuse que dangereuse. Il avait réussi à convaincre certains chefs de village de lui accorder un droit de regard sur les activités d'orpaillage dans leurs communautés. En échange, il offrait des compensations financières aux villageois, créant ainsi une chaîne de complicité qui rendait la tâche des autorités encore plus difficile. Grâce à ces arrangements, des dizaines d'orpailleurs travaillaient pour lui, extrayant des quantités importantes d'or chaque semaine. Mais cette stratégie a fini par s’effondrer, et l’arrestation de K.K.D a marqué un tournant majeur dans la lutte contre l’orpaillage illégal.

Cependant, l'interpellation de ce financier n'a pas été de tout repos. Selon des témoins, à l'annonce de son arrestation, plusieurs villageois, attachés à cet homme devenu prospère grâce à ses activités, ont tenté de s’opposer à son arrestation. Ils se sont rapidement regroupés autour de la maison de K.K.D dans l’espoir de le protéger des forces de l’ordre. Mais les policiers, bien préparés, ont rapidement maîtrisé la situation, dispersant la foule avec des gaz lacrymogènes.

Des villages comme Krakoukro, Konandi-Ndakro, Koffi-Amonkro, Ngodjou, Wattis, et Bahérémi sont devenus des points chauds où ces activités illicites prolifèrent, souvent avec la complicité passive ou active de certains responsables locaux. Les substances toxiques utilisées dans ces pratiques, telles que le mercure et le cyanure, polluent gravement les sols et les cours d’eau, mettant en péril non seulement les populations humaines, mais aussi la faune et les ressources halieutiques de la région. Le danger ne se limite pas à l’environnement : les conflits entre orpailleurs et les tensions avec les autorités locales exacerbent l’instabilité dans ces zones rurales.

Malgré les campagnes de sensibilisation menées par les autorités préfectorales pour dénoncer les risques et dangers de l'orpaillage clandestin, la réalité sur le terrain reste préoccupante. Les gains financiers importants qu’offrent ces activités illégales attirent de plus en plus de personnes, en particulier dans un contexte où les opportunités économiques légales sont limitées.

Toutefois, son arrestation envoie un message fort à ceux qui seraient tentés de suivre ses traces.

Si l’orpaillage clandestin a prospéré en silence pendant longtemps, il semble désormais que l’étau se resserre sur ses principaux protagonistes. Il ne reste plus qu’à espérer que cette arrestation soit le premier pas vers l’éradication totale de cette activité destructrice dans la région de l’Iffou.

Jean Chresus, Abidjan