Après quatre longues années d’attente, la nouvelle est enfin officielle. Ce mercredi 3 septembre 2025, Maître Aboutou Koffi Kouassi, naturothérapeute et fervent défenseur de la médecine traditionnelle, a présenté à la presse l’arrêté ministériel n°00016/MSHP/CAB, signé le 1er février 2021 par l’ancien ministre de la Santé, Dr Aka Aouélé. Ce texte encadre la création, l’organisation et le fonctionnement des Unités de Médecine Traditionnelle (UMT) dans les CHU, les Centres Hospitaliers Régionaux (CHR) et les hôpitaux généraux du pays.

Un document historique qui, selon Maître Aboutou, marque « la reconnaissance et la réhabilitation officielle » d’une pratique ancestrale, utilisée par près de 90 % de la population ivoirienne avant l’avènement de la médecine moderne.

« Aujourd’hui, la Côte d’Ivoire reconnaît enfin la valeur de sa médecine ancestrale », a-t-il déclaré, la voix chargée d’émotion, devant des journalistes médusés par la portée de l’événement.

Tout commence le 13 août 2013, avec une collaboration pilote entre le Programme National de Promotion de la Médecine Traditionnelle (PNPMT) et le CHU de Treichville. En cinq ans, plus de 70 000 patients sont pris en charge par une équipe pluridisciplinaire composée de tradipraticiens, jeunes médecins, aides-soignants, chimistes et herboristes.

Mais en mai 2018, cette collaboration est brutalement interrompue. Un courrier officiel met fin à l’expérience, reprochant à Maître Aboutou des « publicités tapageuses » et un « manque de collaboration ». Un choc pour le praticien, qui entame alors une longue bataille administrative et médiatique.

« Nous avons écrit partout : au Président de la République, au Président de l’Assemblée nationale, au Conseil économique et social… sans relâche, pour faire entendre notre voix », rappelle-t-il.

Finalement, l’arrêté est signé en février 2021… mais ce n’est qu’en août 2025, après un entretien houleux avec le directeur de coordination du PNPMT, que Maître Aboutou en obtient officiellement une copie.

Pour le naturothérapeute, cet arrêté représente bien plus qu’une simple validation administrative. Il symbolise un changement de paradigme dans la prise en charge des patients.

Grâce à la mise en place des UMT, il sera désormais possible d’assurer, une prise en charge conjointe des patients par des médecins modernes et des tradipraticiens, la dispensation de médicaments traditionnels certifiés et la recherche scientifique pour documenter et valider les savoirs ancestraux.

« Nos savoirs ne seront plus relégués au rang de pratiques empiriques. Nous serons des partenaires officiels de la médecine moderne », se réjouit-il.

Maître Aboutou en a profité pour lancer un appel à ses confrères : « J’invite tous les tradipraticiens. Nous sommes plus de 14 000 à s’inscrire au PNPMT pour participer à cette collaboration historique. Il faut que chaque région s’organise pour créer ses propres unités. »

Il a également souligné l’urgence de réhabiliter les infrastructures hospitalières régionales afin d’accueillir ces nouvelles unités, et a plaidé pour une implication plus forte des collectivités locales.

« Nous voulons participer activement à la prise en charge de nos populations, ces agents du développement d’une Côte d’Ivoire en paix », a-t-il déclaré.

Au-delà de l’aspect technique, Maître Aboutou s’est confié sur la dimension spirituelle de son engagement, affirmant que son orientation vers la médecine traditionnelle lui a été dictée par des « signes divins ».

« Je n’ai pas choisi la médecine traditionnelle pour m’enrichir. J’étais déjà riche grâce à ma carrière de céramiste », a-t-il raconté, en évoquant des guérisons inexpliquées et des expériences mystiques qui ont marqué son chemin.

Avec la publication de cet arrêté, la médecine traditionnelle ivoirienne franchit une étape décisive : celle de l’intégration légale et fonctionnelle dans le système national de santé.

« Ce n’est qu’un début », prévient Maître Aboutou.

« L’avenir se construira avec nous, pour le bien-être de tous les Ivoiriens», a-t-il conclu. 

Wassimagnon