Téné Birahima Ouattara

À Abobo, commune emblématique du nord d’Abidjan et bastion traditionnel du parti présidentiel, l’élection de Téné Birahima Ouattara, dit Photocopie, aux législatives de 2025 restera comme un moment politique majeur. Avec plus de 92 000 suffrages recueillis, le candidat du RHDP réalise un score inédit dans cette circonscription longtemps surnommée « Adoland », en référence à son attachement constant au président Alassane Ouattara.

Ce résultat s’inscrit dans une longue tradition électorale favorable au parti au pouvoir. Depuis 2011, Abobo a systématiquement placé le RDR, puis le RHDP, en tête des consultations électorales. Aux législatives de 2011, le RDR y avait engrangé près de 79 000 voix, porté par l’élan de l’après-crise. Les scrutins suivants ont toutefois révélé une mobilisation plus irrégulière. Aux municipales de 2013, le score est retombé autour de 48 000 voix, avant de connaître une nouvelle baisse lors des législatives de 2016, avec un peu plus de 40 000 suffrages sous la bannière RHDP.

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La tendance s’est progressivement redressée à partir de 2018. Les municipales de cette année-là ont été remportées avec un peu plus de 50 000 voix, une dynamique confirmée lors des législatives de 2021, où le RHDP franchissait à nouveau la barre des 60 000 suffrages. En 2023, aux municipales, le parti s’est maintenu autour de 59 000 voix, traduisant une fidélité électorale réelle, mais marquée par un sentiment de frustration croissant au sein des populations.

Car à Abobo, bastion politique ne rime pas avec soutien inconditionnel. Ces dernières années, de nombreux observateurs évoquaient un malaise diffus, alimenté par la perception d’un décalage entre l’attachement politique de la commune et les réponses concrètes apportées à ses défis sociaux, urbains et économiques. C’est dans ce contexte que la candidature de Téné Birahima Ouattara a pris une dimension particulière. Pour beaucoup d’électeurs, le choix du frère du chef de l’État a été interprété comme un signal politique fort, celui d’un réinvestissement assumé du sommet de l’État dans une commune stratégique.

Le score historique enregistré en 2025 apparaît ainsi comme l’expression d’un accueil favorable des populations, sensibles à cette marque d’attention. Il redonne un souffle nouveau au parti présidentiel à Abobo, en réactivant un lien ancien que les électeurs souhaitent désormais voir consolidé par des actes concrets.

Désigné candidat seulement quelques semaines avant le scrutin, Téné Birahima Ouattara a mené une campagne courte mais ciblée. Loin des grands meetings, il a privilégié les rencontres de proximité avec les communautés, les organisations professionnelles, les chefs de quartiers, les jeunes et les femmes. Une stratégie en phase avec la sociologie d’Abobo, qui a permis d’instaurer un contact direct et de transformer une candidature tardive en dynamique massive.

Réputé discret, voire réservé, celui que beaucoup appellent simplement « Ibrahim » s’est montré plus accessible durant la campagne. Il a évoqué, fait rare, une partie de son enfance partagée entre Abobo et Yopougon, rappelant un parcours ancré dans les réalités populaires d’Abidjan. Cette prise de parole personnelle a contribué à humaniser son image auprès d’un électorat attentif aux symboles.

Un autre moment fort de la campagne a été son témoignage sur la relation de confiance entretenue avec son médecin traitant, originaire de l’Ouest du pays, qui l’a accompagné lors d’un épisode de maladie. Un récit sobre, présenté comme une illustration du vivre-ensemble ivoirien, au-delà des clivages régionaux.

La stature politique du candidat s’est également affirmée hors d’Abobo. En pleine période électorale, Téné Birahima Ouattara a marqué les esprits en se rendant à Man, théâtre d’un affrontement sensible entre la liste RHDP conduite par Mamadou Bamba, dit Momo, et une liste indépendante menée par Sidiki Konaté. Son intervention, aux côtés de plusieurs cadres du parti, a été perçue comme décisive par de nombreux observateurs, la liste du RHDP remportant finalement le scrutin. Cet épisode a renforcé son image de pilier du dispositif politique du parti présidentiel.

Le succès d’Abobo repose enfin sur une mobilisation collective. La campagne a bénéficié du soutien actif de nombreux cadres du RHDP, sous la coordination de Kandia Camara, présidente du Sénat et directrice de campagne. La synergie entre l’appareil politique, les relais locaux et l’engagement personnel du candidat a permis de transformer une base fidèle en adhésion massive.

À Abobo, un score aussi élevé vaut à la fois reconnaissance et exigence. Les populations, réputées attentives et exigeantes, attendent désormais que cette mobilisation exceptionnelle se traduise par des actions visibles et durables. Le scrutin de 2025 ouvre ainsi une nouvelle séquence politique, où la proximité devra s’inscrire dans la continuité et les promesses trouver une traduction concrète sur le terrain.

Wassimagnon