

Cameroun : Fitch évoque la réélection de Biya, maintient la note « B » mais signale des risques politiques
Biya
Fitch Ratings, l’agence de notation financière américaine à vocation internationale, a confirmé la note de crédit 'B' du Cameroun, tout en maintenant des perspectives négatives qui soulignent les défis auxquels fait face la première économie de la Cemac.
Economie minée par des risques politiques
Toujours selon Fitch, le Cameroun conserve des atouts économiques indéniables : une croissance du PIB résiliente atteignant 3,9 % en 2024 (contre 3,2 % en 2023), un niveau d'endettement modéré de 41,7 % du PIB, et une gestion maîtrisée des échéances de la dette extérieure. Ces facteurs contrastent favorablement avec d'autres pays de la région.
Cependant, l'horizon politique assombrit ces perspectives. À 92 ans et au pouvoir depuis 1982, le président Paul Biya devrait briguer un nouveau mandat lors de l'élection d'octobre 2025. Si Fitch anticipe sa réélection, l'absence d'un plan de succession clair et les divisions au sein du parti au pouvoir font planer un risque considérable de transition chaotique. Cette incertitude politique pourrait déstabiliser un pays déjà confronté à des défis sécuritaires persistants dans plusieurs régions.
Faiblesses structurelles
Selon Fitch, la gestion des finances publiques camerounaises révèle des faiblesses inquiétantes. Des retards répétés dans le service de la dette extérieure ont été constatés, même s'ils ont été régularisés dans les délais de grâce. En mars 2024, un paiement dû à un créancier commercial a ainsi été retardé, comme l'a révélé Fitch en juillet.
Plus préoccupant encore, un financement de 200 millions USD (0,4% du PIB) prévu par la Banque mondiale pour 2024 a été reporté au premier trimestre 2025, en raison de retards dans la mise en œuvre des réformes structurelles promises.
Des progrès notables ont été réalisés dans la réduction des arriérés intérieurs, avec l'apurement de 732 milliards de XAF (2,3% du PIB) en 2024. Cet effort a été rendu possible grâce à un prêt d'Afreximbank et à un emprunt commercial extérieur.
Malgré ces avancées, les arriérés totaux s'élevaient encore à 342 milliards de XAF (1,1% du PIB) fin 2024, soit une augmentation des arriérés à long terme par rapport à 2023 (0,5% du PIB). Fitch identifie « un risque continu d'accumulation d'arriérés » en raison des déficiences persistantes dans la gestion budgétaire.
Perspectives économiques sous surveillance
Le déficit budgétaire s'est creusé à 1,4% du PIB en 2024 (contre 0,6% en 2023), principalement en raison d'une baisse des recettes pétrolières. Les analystes prévoient que ce déficit se stabilisera autour de 1% pour 2025-2026.
La dette publique devrait poursuivre sa trajectoire baissière, passant de 41,7% en 2024 à 40% du PIB en 2026, un niveau nettement inférieur à la médiane de 50,6% pour les pays notés 'B'. Cette performance positive reste toutefois fragile face aux incertitudes politiques.
Besoin de soutien international
Le programme actuel du FMI, qui se termine en juin 2025, constitue un filet de sécurité essentiel pour le Cameroun. Fitch souligne que les besoins de financement du pays devraient diminuer à 4,7% du PIB en 2025 (contre 5,7% en 2024).
L'agence considère comme fondamental le maintien d'un « soutien fort des créanciers officiels à moyen terme », avec un probable nouveau programme du FMI en 2026. L'absence d'un tel programme représenterait "un risque clé pour le plan de financement" du pays.
Facteurs d'amélioration ou de dégradation
Une dégradation de la note pourrait survenir en cas de faiblesses persistantes dans la gestion financière, notamment une nouvelle accumulation d'arriérés extérieurs, ou une instabilité politique accrue qui perturberait l'activité économique et l'accès aux marchés financiers.
À l'inverse, une amélioration durable dans la gestion des finances publiques et une réduction des risques liés à la succession présidentielle pourraient conduire à une révision positive de la notation du Cameroun.
-Armand Ougock, correspondant permanent de Koaci au Cameroun.
-Joindre la rédaction camerounaise de Koaci au 237 691154277-oucameroun@koaci.com

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