Cameroun : Visite annoncée du pape Léon XIV, quand la diplomatie religieuse s'invite dans la tourmente politique
Léon XIV
Le pape Léon XIV prépare sa première tournée africaine, il est annoncé au Cameroun dans un contexte post-électoral explosif.
À peine six mois après son accession au trône de Saint-Pierre, le pape Léon XIV s'apprête à effectuer sa première visite officielle en Afrique. Une tournée qui doit le conduire au Cameroun et en Guinée équatoriale début 2026, mais dont la dimension diplomatique dépasse largement le cadre purement religieux.
L'archevêque métropolitain de Douala, Mgr Samuel Kleda, a officialisé cette visite dans une lettre adressée au gouverneur de la région du Littoral, Samuel Dieudonné Ivaha Diboua. Le prélat y sollicite la participation de représentants des services administratifs pour une réunion préparatoire prévue le 30 octobre 2025 dans la salle des Actes de l'archevêché de Douala.
Cette séance de travail devait réunir les émissaires du Saint-Siège, le clergé de l'archidiocèse, ainsi que des représentants du gouverneur du Littoral, du préfet du Wouri, du sous-préfet de Douala 1er, des forces de maintien de l'ordre, de la mairie et de l'Office national des infrastructures et équipements sportifs (ONIES).
Timing politique
L'annonce intervient dans un contexte post-électoral particulièrement explosif. Le Cameroun traverse une crise sociopolitique sans précédent depuis la proclamation des résultats de la présidentielle attribuant la victoire à Paul Biya avec 53,66% des suffrages, pour un huitième mandat à 92 ans.
Cette visite papale, préparée en toute discrétion, soulève dès lors une question centrale : s'agit-il d'un geste purement pastoral ou d'une implication diplomatique du Vatican visant à pacifier le climat dans ce pays à forte communauté catholique ?
Tradition papale
Le Cameroun entretient une longue histoire avec les visites pontificales. Il figure parmi les rares pays subsahariens à avoir accueilli plusieurs souverains pontifes sur son territoire.
La dernière visite remonte à mars 2009, lorsque Benoît XVI avait choisi Yaoundé comme première étape de sa tournée apostolique africaine. Il y avait été chaleureusement accueilli et avait remis d'importants documents en vue du Synode sur l'Afrique. Cette visite constituait la troisième d'un pape catholique au Cameroun, après les passages de Jean-Paul II en 1985 et 1995.
Le pape François, aujourd'hui de vénérée mémoire, n'avait jamais effectué de visite au Cameroun, privilégiant la Centrafrique voisine et la République démocratique du Congo lors de ses déplacements africains.
Première africaine pour Léon XIV
Si cette visite se confirme pour début 2026, elle marquera la première incursion du pape Léon XIV sur le continent africain depuis sa prise de fonction canonique. Un choix qui n'est pas anodin et témoigne de l'importance que le Vatican accorde à cette région où le catholicisme connaît une croissance démographique significative. Le nombre de catholiques au Cameroun est estimé à environ 7 millions en 2023, représentant environ 26% de la population. Des estimations antérieures mentionnaient près de 10 millions de catholiques, soit 38,4% de la population.
La situation politique à Yaoundé pourrait toutefois compliquer les plans du Saint-Siège. La tension persistante autour de la réélection contestée de Paul Biya place le Vatican dans une position délicate : comment incarner un message de paix et de réconciliation sans paraître cautionner ou, au contraire, remettre en cause le pouvoir en place ?
Cette visite papale s'inscrit également dans un contexte géopolitique plus large, où les soutiens diplomatiques au président camerounais se sont révélés clivants. Tandis que les puissances occidentales affichent une réserve marquée, la Russie et plusieurs pays africains ont rapidement félicité Paul Biya, illustrant les nouvelles configurations d'alliances sur le continent.
Vatican, médiateur potentiel ?
Pour le Cameroun, pays profondément catholique, la venue du souverain pontife pourrait constituer une opportunité de dialogue et d'apaisement. Le Vatican, fort de son expérience en matière de médiation internationale, dispose de la légitimité morale pour encourager le dialogue entre les différentes parties prenantes de la crise camerounaise.
Reste à savoir si cette visite, dont les détails précis n'ont pas encore été dévoilés, parviendra à transcender les clivages politiques pour incarner véritablement un message d'unité et de réconciliation nationale. Les prochains mois seront déterminants pour évaluer si cette initiative pontificale peut contribuer à apaiser les tensions ou si elle risque, malgré elle, de cristalliser davantage les positions dans ce pays en proie au doute sur son avenir politique.
-Armand Ougock, correspondant permanent de Koaci au Cameroun.
-Joindre la rédaction camerounaise de Koaci au 237 691154277-oucameroun@koaci.com
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