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Cameroun : Suspension de 21 géomètres au Cadastre, une mesure symbolique face à la corruption des agents publics
 

Cameroun : Suspension de 21 géomètres au Cadastre, une mesure symbolique face à la corruption des agents publics

 
 
 
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© Koaci.com - jeudi 27 novembre 2025 - 07:57


Le 21 novembre 2025, le ministère des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières (MINDCAF), Henri Eyebe Ayissi a annoncé la suspension provisoire de 21 agents publics exerçant comme géomètres du Cadastre. Cette mesure administrative, d'une durée de quatre mois, vise des fonctionnaires occupant différents grades — ingénieurs des travaux, techniciens supérieurs et techniciens du Cadastre — répartis dans les services déconcentrés à travers le territoire national.


Les accusations portées contre ces agents sont graves : manipulation frauduleuse des documents cadastraux (mappe foncières), blocage intentionnel des dossiers des usagers, pratiques de tarification excessive des services et participation active à des réseaux de fraude. Ces comportements constituent des violations flagrantes des obligations déontologiques inscrites dans le décret du 7 octobre 1994 régissant la fonction publique camerounaise.


Conformément à l'article 108 du décret en vigueur, cette suspension administrative maintient le versement des salaires des mis en cause tout en les écartant de leurs fonctions. Toutefois, le ministre Henri Eyebe Ayissi a laissé entendre que des sanctions plus sévères pourraient être prononcées à l'issue des enquêtes en cours.


Corruption systémique


Si cette mesure peut sembler énergique à première vue, elle doit être analysée dans le contexte plus large de la corruption endémique qui gangrène le secteur foncier camerounais. Dans son rapport de 2022, la Commission nationale anti-corruption (Conac) a placé le ministère des Domaines, du Cadastre et des Affaires foncières en tête des ministères les plus corrompus du Cameroun, un constat alarmant qui n'a pas fondamentalement changé depuis.


Les chiffres parlent d'eux-mêmes : avec un score de 26 sur 100, le Cameroun occupe le 140e rang sur 180 pays dans l'indice de perception de la corruption 2024 de Transparency International, enregistrant même un recul d'un point par rapport à 2023. Cette régression témoigne de l'insuffisance des efforts gouvernementaux malgré les déclarations d'intention.


Système corrompu


 

La corruption dans le secteur foncier camerounais ne se limite pas à quelques agents véreux. Il s'agit d'un système profondément ancré dans les pratiques administratives quotidiennes. Des sommes frauduleuses sont exigées dès la première étape du processus d'immatriculation : alors que le récépissé coûte officiellement 3 000 FCFA en moyenne, certaines sous-préfectures réclament entre 20 000 et 50 000 FCFA, sans délivrer le moindre reçu.


Le processus se poursuit avec les commissions consultatives, où chaque membre fixe son propre tarif pour signer le constat d'occupation, certains exigeant jusqu'à 100 000 FCFA. Les géomètres assermentés ne sont pas en reste : bien que les frais officiels de bornage s'élèvent à environ 27 500 FCFA, certains professionnels réclament des sommes allant de 50 000 à 200 000 FCFA.


Cette situation a conduit un député à qualifier le ministère des Domaines de « probablement le ministère le plus corrompu » du pays, soulignant que les titres fonciers sont devenus de simples « chiffons » sans valeur réelle, au point que les banques camerounaises ne les acceptent plus comme garantie pour les prêts.


Conséquences


L'impact de cette corruption systémique dépasse largement les désagréments administratifs. Elle paralyse le développement économique du pays en sapant la confiance des investisseurs. Comment peut-on attirer des capitaux étrangers lorsque le droit de propriété n'est pas garanti ? Les litiges fonciers mettent en évidence les menaces récurrentes pesant sur les investissements, tous les partenaires bilatéraux et multilatéraux s'interrogeant sur l'attractivité du Cameroun dès lors que le droit de propriété est constamment fragilisé.


Pour les citoyens ordinaires, les conséquences sont tout aussi dramatiques. La corruption absorbe une part considérable des revenus des ménages,

particulièrement les plus modestes, pour qui l'obtention d'un titre foncier représente souvent le projet d'une vie. Cette situation crée également un climat d'insécurité juridique où les droits de propriété peuvent être contestés à tout moment, alimentant une multitude de conflits fonciers à travers le pays.


Face à ce fléau, les autorités multiplient les initiatives qui peinent à convaincre de leur efficacité réelle. Le ministre Eyebe Ayissi a contesté les conclusions du rapport de la Conac, préférant mettre en avant les actions menées par son département : un numéro vert gratuit (le 1527) opérationnel depuis 2021, et une cellule de lutte contre la corruption créée en 2006 et dont les membres ont été installés dans leurs fonctions le 11 janvier 2023.


L'annulation ponctuelle de titres fonciers frauduleux, comme celle des 127 titres dans le département de l'Océan en juillet 2023, révèle l'ampleur du problème plutôt qu'elle ne démontre une capacité à le résoudre durablement.


 

Mal enraciné


La corruption au Cameroun ne se limite pas au secteur foncier. Elle constitue un problème structurel affectant l'ensemble de l'appareil d'État. Le système repose sur des mécanismes de népotisme, de clientélisme et de patronage politique qui perpétuent les pratiques corrompues d'une génération à l'autre.



Cette réalité a été reconnue au plus haut niveau de l'État, le président Paul Biya ayant promis dans son discours du 31 décembre 2023 une intensification de la lutte contre la corruption. Cependant, les observateurs restent sceptiques face à ces déclarations récurrentes qui ne se traduisent que rarement par des changements concrets et durables.


Le Cameroun porte le lourd fardeau d'avoir été désigné à deux reprises comme champion du monde de la corruption par Transparency International. Cette réputation désastreuse continue de peser sur le développement du pays et sur la confiance de sa population envers les institutions publiques.


-Armand Ougock, correspondant permanent de Koaci au Cameroun.

-Joindre la rédaction camerounaise de Koaci au 237 691154277-ou cameroun@koaci.com


 
 
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