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Côte d'Ivoire : Pr Béatrice Sangaré (pharmacienne-toxicologue): « Le phénomène Kadhafi me trouble profondément, je suis paniquée »
 

Côte d'Ivoire : Pr Béatrice Sangaré (pharmacienne-toxicologue): « Le phénomène Kadhafi me trouble profondément, je suis paniquée »

 
 
 
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© Koaci.com - lundi 09 octobre 2023 - 09:29

Béatrice Sangaré


Pharmacienne et professeure de toxicologie à l'université Félix Houphouet Boigny d'Abidjan, Tigori Béatrice épouse Sangaré, fait de la sensibilisation et de la lutte contre la toxicomanie son cheval de bataille. Régulièrement présente sur les plateaux de télévision et dans l'environnement scolaire, elle ne se laisse pas d'interpeller parents, enfants et autorités à mener la bataille contre la toxicomanie. En marge d'une rencontre des pharmaciens sur le phénomène de Kadhafi, le professeure Tigori Béatrice épouse Sangaré s'est confié à la rédaction de Koaci.com. Notre entretien !


Koaci: Professeure, quelle est aujourd'hui la situation de la toxicomanie en Côte d'Ivoire ?


Prof. Tigori Béatrice Sangaré: La toxicomanie en Côte d'Ivoire, est connue depuis longtemps. Mais le phénomène "Kadhafi" dont nous parlons est une nouvelle variante. Je vous dis, monsieur, que les travaux faits sur l'année scolaire 2019-2020, ont montré que dans la ville d'Abidjan et plus précisément dans les écoles de garçons, nous avons relevé 21 % des enfants qui étaient positifs à quelque chose qui dérange la tête. Cela peut être l'alcool, le tabac, les drogues classiques qu'on connait, mais aussi des médicaments. Dans ces écoles de garçons donc, nous avons eu 21 % des élèves positifs à ces substances. Je vous parle bien des enfants qui ne sont pas malades et qui vont à l'école. Des tests ont été réalisés chez ces enfants et ce sont les résultats que nous vous livrons. Dans les écoles des filles, c'est 12 % de positifs et dans les écoles mixtes, c'est 15 %. Ce sont des enfants qui ne sont pas malades. Il n'y a pratiquement plus d'internat dans ce pays et donc ce sont des enfants qui vivent avec nous à la maison. C'est assez grave pour être noté. Pendant qu'on en parle, on a cette nouvelle orientation de "Kadhafi" où on voit bien que ce sont des produits destinés à bousiller la tête des enfants. C'est pour cela que nous crions. Nous crions parce que tant que le marché illicite de vente de produit n'est pas fermé, ces vendeurs de drogue vont emprunter ces chemins. Avec ce que nous avons vu, c'est-à-dire, les 21 %, les 12 % et 15 %, nous sommes convaincus qu'aujourd'hui, ces tendances ont encore augmenté vu la fulgurance que ce nouveau phénomène de Kadhafi a prise. Nous demandons à tout le monde et à chacun de jouer sa partition.


Koaci : Êtes-vous en train de dénoncer le laxisme du gouvernement face à cette situation ?


Prof. T.B.S : J'estime que ce marché illicite de médicaments de qualité inférieure et falsifiée, nous les pharmaciens, le dénoncions depuis près de 30 ans. Si quelque chose avait été fait, on n'en serait pas là aujourd'hui. Si les choses avaient été faites correctement, nous n'en serions pas là aujourd'hui. Ce ne sont pas les pharmaciens qui doivent ramasser les médicaments. Ce sont les forces de l'ordre, c'est le ministère de l'Intérieur, c'est le ministère de la Justice. Les pharmaciens, bien au contraire, ne font que subir.


 

Koaci: Qu'est-ce qui empêche le gouvernement de le faire selon vous ?


Prof. T.B.S: C'est la question que nous nous posons parce que la question de la sécurité et de l'ordre, relève du pouvoir régalien. Ce n'est donc pas à nous, pharmaciens, de répondre à cette question, mais à l'Etat pour que les forces dédiées à l'ordre et à la sécurité vous répondent. Nous constatons que les choses ne sont pas faites comme il se doit. Je suis inquiète et ce phénomène de Kadhafi me trouble profondément. Et pourtant, je suis pharmacienne toxicologue, je suis professeur de toxicomanie, j'ai vu beaucoup de choses, mais là, je suis paniquée.


Koaci: Qu'est-ce qui motive les enfants à consommer ce genre de produit ?


En toxicologie, on dit que pour arriver à cette activité qui consiste à consommer des produits qui ont une action particulière sur le cerveau, il faut qu'il y ait trois facteurs qui se rassemblent. Il y a le facteur de la personnalité, les produits qui circulent et un environnement socioculturel défavorable. Tout ce qui est épisode difficile que quelqu'un peut vivre est mis sur le vocable environnement socioculturel défavorable. Les produits qui circulent, ce sont les drogues classiques que sont la cocaïne, le cannabis et les médicaments que ces personnes vont détourner de leurs usages. La personnalité, c'est celle du sujet, l'enfant. La seule carte sur laquelle nous pouvons jouer, c'est la personnalité, l'éducation que nous donnons à nos enfants. C'est parce que l'enfant aura été bien éduqué, c'est parce que l'enfant aura une bonne personnalité, que même s'il a failli et qu'il est tombé dans les bras de quelqu'un qui lui a fait essayer le produit, nous pouvons le rattraper. C'est parce qu'il aura été bien éduqué, qu'il réussira à résister à la tentation de faire comme les autres. Dans tous les cas, les enfants peuvent nous échapper, mais si l'éducation est solide, cela nous permet de les rattraper là où ils sont tombés. Donc pendant que nous pleurons pour que l'Etat ramasse les produits qui circulent, nous insistons sur le fait que les parents ont un contrôle parental qu'ils doivent exercer sur leurs progénitures. On éduque son enfant avec sa présence physique et non avec son argent. Si les basiques sont installés, même si l'enfant chute, nous avons les moyens psychologiques de le rattraper, parce qu'il a grandi avec une certaine éducation, il a une certaine contenance pour pouvoir apprendre à revenir sur le droit chemin.


 

Koaci: D'après les contacts que vous avez eus avec ces enfants qui s'adonnent au phénomène Kadhafi, que recherchent-ils exactement en faisant cela ?


Prof. T.B.S : C'est la curiosité débordante. Ils ont vu beaucoup de bêtises sur les réseaux sociaux, sur Internet et surtout sur les mauvais réseaux et ils sont tentés de reproduire cela. Si vous voyez que je reviens chaque fois sur le contrôle parental, c'est parce que les signes ne sont pas des signes qui passent inaperçus. Le parent qui voit son enfant qui fait des convulsions mentales, le parent qui voit son enfant qui a une posture particulière, doit être attiré par l'attitude de son enfant, parce qu'il est possible qu'à travers son attitude, il soit en train de faire son entrée dans un monde pervers. Il est important de surveiller toutes les étapes de la transformation de nos enfants. Nous devons vivre avec nos enfants. Il n'est pas question qu'en tant que parent, on ne puisse pas s'inquiéter quand on ne voit pas son enfant à la maison pendant deux jours. Le contrôle parental existe et il doit nous permettre d'écraser le risque qu'on rencontre le produit ou d'écraser le risque que quelqu'un d'autre l'entraîne vers ces chemins tortueux. Nous comptons sur vous, les acteurs de la presse, pour nous aider à diffuser les messages de sensibilisation.



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