

Côte d'Ivoire : Déguerpissement annoncé dans la forêt classée de Dakpadou (Gboklê), les occupants plaident pour une approche humanitaire
Dans un discours plein de sollicitude et de préoccupation, Fehiaka Jean Thomas, porte-parole du chef de terre de Dakpadou, a exprimé sa ferme opposition au déguerpissement des populations installées dans la forêt classée de la sous-préfecture de Dakpadou, un territoire qui a été octroyé à des agro-industries.
Il a insisté sur l’importance d’adopter une approche plus humaine et de chercher des solutions viables pour les occupants, qui ont déjà investi de nombreuses années de leur vie dans cette terre.
L'histoire des occupants remonte à la crise de 2005, lorsque des personnes se sont installées dans la forêt classée pour y cultiver du cacao, une activité qui était tolérée par l'État.
Selon Fehiaka Jean Thomas, les autorités ivoiriennes ont initialement accepté cette situation dans l'objectif de soutenir les planteurs tout en mettant en place des pratiques d'agroforesterie, où les cultivateurs de cacao devaient reboiser leurs champs de manière progressive.
Au fil du temps, l'État a même facilité l'enregistrement et la régularisation des exploitants par le biais du Conseil du Café-Cacao, qui a attribué des cartes et des terrains aux planteurs.
Toutefois, en 2022, un revirement de situation a bouleversé la donne : des investisseurs privés se sont vu octroyer des parcelles de cette même forêt classée pour y installer des plantations de palmiers. Cette décision a eu pour conséquence de rendre obsolètes les cultures de cacao et a mis en péril la vie des 2500 familles qui ont trouvé un abri dans ces terres.
L’annonce de l’expulsion imminente des occupants a provoqué une grande inquiétude au sein des communautés. Fehiaka Jean Thomas explique qu’une telle décision risquerait d’avoir des effets dévastateurs pour les habitants de la région, en particulier ceux du village de Dakpadou.
Selon lui, ces familles, qui ont contribué à la croissance et au développement du village au cours des 20 dernières années, sont aujourd’hui confrontées à une situation inextricable.
« L'État a ses raisons, mais nous, nous plaidons pour une approche humanitaire. Il est important de tenir compte du bien-être des habitants et de l'impact que cette décision aura sur notre région », a-t-il déclaré.
En effet, l'installation de ces populations a permis d’aménager des infrastructures vitales pour le village, telles que des écoles, des installations électriques et des services de base. Le déguerpissement de ces occupants affecterait non seulement leur quotidien, mais aussi le développement de la sous-préfecture dans son ensemble.
Face à cette impasse, Fehiaka Jean Thomas et le chef de terres ont formulé plusieurs propositions pour tenter de trouver un compromis entre l'État et les occupants des forêts classées.
La première suggestion était de permettre aux planteurs de rester dans la forêt et de continuer à cultiver du cacao, en remplaçant le palmier par cette culture, ou bien de les intégrer dans des projets d’agriculture durable. Une autre proposition envisageait d’accompagner les planteurs dans leur reconversion en leur offrant une compensation financière ou des facilités pour relocaliser leurs activités ailleurs.
Cependant, les investisseurs en agro-industrie ont exprimé leur désir de conserver l'exclusivité de la gestion des terres et ont rejeté ces propositions, préférant une expulsion totale des occupants.
Face à ce refus, le porte-parole a plaidé pour un report du déguerpissement, offrant ainsi un délai supplémentaire de cinq à six ans pour permettre aux familles de s'adapter et de trouver une solution à leur situation.
Dans ses propos, Fehiaka Jean Thomas a souligné l’urgence d’adopter une approche plus humaine, affirmant qu’il ne s’agit pas d’inciter à la violence ou de dénigrer les autorités, mais de solliciter une écoute attentive des préoccupations des communautés locales.
« Nous ne voulons pas aller contre la décision de l'État. Nous demandons seulement que des mesures d'accompagnement soient prises pour atténuer les souffrances de ces populations qui ont contribué à l’essor de nos régions », a-t-il insisté.
Le porte-parole a conclu son allocution en lançant un appel aux autorités, leur demandant de tenir compte des réalités sociales et économiques des villages concernés et d'adopter une décision qui soit à la fois juste et humaine. Il a ainsi demandé pardon au nom de ses communautés, espérant que l'État prendra en considération ces doléances pour éviter une crise humanitaire.
Le plaidoyer de Fehiaka Jean Thomas souligne la nécessité d’un dialogue constructif et d’une réflexion approfondie avant toute décision concernant l’avenir des occupants de la forêt classée de Dakpadou. Alors que l'État et les agro-industries privilégient des décisions basées sur des impératifs économiques, il est essentiel que la dimension humaine soit prise en compte pour éviter des conséquences désastreuses pour ces familles qui ont tissé des liens solides avec cette terre depuis deux décennies.
Notons que la forêt classée située dans le Gboklê est à cheval entre les sous-préfectures de Dapkadou et de Sago.
Par ailleurs au cours de cette rencontre avec la presse, le porte-parole avait à ses côtés, le chef de terres, Hodjé Francis Lougbo et certains occupants de la forêt classée.
Wassimagnon

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