

Côte d'Ivoire : Abobo, à 12 ans, Aïcha brûlée au couteau par sa tante pour 3 000 francs
la tante et la fille brûlée (Ph KOACI)
À Abobo-N’dotré, le jeudi 19 juin 2025, la police du 41e arrondissement a été alertée en urgence par un appel anonyme. La voix, au bout du fil, parlait d’une enfant gravement blessée, brûlée volontairement. Quelques minutes plus tard, les agents se rendent sur les lieux. Ce qu’ils découvrent dépasse l’entendement.
Dans une cour modeste, une fillette de 12 ans, le visage et les jambes couverts de brûlures, erre en silence. Elle s’appelle Aïcha. Depuis un an, elle vit à Abobo, chez une tante qui devait prendre soin d’elle après son départ d’Issia. Mais au lieu d’un refuge, l’enfant a trouvé une prison. Chaque matin, un seau d’eau glacée à la main, Aïcha partait vendre dans les rues et gares du quartier. En retour, sa tante exigeait une somme fixe : 3 000 francs CFA, peu importe les circonstances. Et quand l’enfant rentrait sans l’avoir, les coups pleuvaient.
Ce jeudi-là, elle n’a pas vendu assez. Elle est rentrée les mains presque vides. Sa tante, une femme de 57 ans, furieuse, l’a enfermée. Elle a pris un couteau, l’a chauffé à vif et l’a appliqué sur sa peau. Au visage, aux jambes, au pied. Puis elle a ouvert la porte et l’a mise dehors, brûlée, humiliée, comme si rien ne s’était passé.
Aïcha n’a pas crié. Elle n’a pas pleuré. C’est un voisin qui a alerté les autorités. Quand la police arrive, la femme tente de s’enfuir. Elle sera rapidement arrêtée. Face aux agents, elle ne nie rien. Elle parle de « correction ». Mais comment peut-on corriger une enfant avec une lame brûlante ?
Aujourd’hui, Aïcha est en sécurité. Elle reçoit des soins. Mais ses blessures ne sont pas seulement visibles. Son regard est celui d’un enfant brisé trop tôt. À 12 ans, elle ne joue pas. Elle ne parle presque pas. Elle regarde, longuement, comme si elle cherchait des réponses.
Des enfants comme Aïcha, il y en a d'autres, dans les rues, dans l’ombre des maisons, silencieux. Des enfants dont l’enfance se mesure en souffrance. Pour certains, le travail commence avant l’aube, et la douleur avant les souvenirs. Aïcha est vivante. Mais pour qu’elle vive vraiment, il faudra plus que des pansements.
Sa tante, elle, devra répondre de ses actes devant la justice. Et la société, elle aussi, devra répondre d’un silence qui laisse tant d’enfants seuls face à la cruauté.
Jean Chresus, Abidjan

Infos à la une




Communiqués
Côte d'Ivoire

Côte d'Ivoire

Côte d'Ivoire
