

Cameroun : Face aux dérives, le ministre de la justice Laurent Esso sonne la fin de la récréation dans les tribunaux
Laurent Esso, ministre de la Justice (Ph)
Au Cameroun, face aux dérives constatées dans le système judiciaire, le Ministère de la Justice vient de lancer un avertissement sévère à l'ensemble des procureurs généraux du pays. Le 16 avril dernier, Jean de Dieu Momo, ministre délégué auprès du ministre d'État en charge de la Justice, Laurent Esso, a adressé une correspondance sans équivoque aux responsables des juridictions de toutes les régions du territoire.
Dans sa lettre, signée sur ordre du garde des Sceaux Laurent Esso, Jean de Dieu Momo dresse un constat inquiétant des pratiques observées dans certains tribunaux. Parmi les manquements pointés du doigt : des verdicts de culpabilité prononcés uniquement sur la base d'une absence à l'audience, des réquisitions dépourvues d'arguments probants ou de précisions sur les peines requises, et des sanctions tantôt scandaleusement légères, tantôt excessivement sévères.
Pour le ministre délégué, ces irrégularités ne sont pas de simples négligences. Elles traduisent « une démobilisation de certains personnels judiciaires » qui met en péril la crédibilité de l'institution. Face à cette situation, l'instruction est claire : les chefs de parquet doivent « reprendre fermement en main tous leurs collaborateurs » et imposer une rigueur exemplaire dans le traitement des affaires pénales.
Nouvelles directives
Le ministère exige désormais que les magistrats motivent clairement leurs réquisitions, de préférence par écrit, en détaillant les éléments de preuve et le quantum de la peine proposée. La simple formule « application de la loi » ne sera plus tolérée. Par ailleurs, tout jugement prononçant une peine manifestement disproportionnée ou fondé uniquement sur l'absence de l'accusé devra systématiquement faire l'objet d'un appel ou d'un pourvoi.
L'affaire Yango, détonateur de la réforme
Cette reprise en main intervient dans un contexte particulièrement tendu, marqué par l'affaire Diane Yango qui a provoqué l'indignation nationale. Pour rappel, le 1er avril, le tribunal d'Ekounou a condamné Éric Bekobo à cinq ans d'emprisonnement avec sursis et 52 000 FCFA d'amende pour des violences conjugales ayant causé la mort de son épouse. Selon l'autopsie, la victime est décédée des suites de « violences physiques compliquées d'hémorragie interne abdominale ».
Cette décision a soulevé un tollé, notamment de la part de l'organisation Universal Lawyers and Human Rights Defence, qui dénonce un jugement banalisant des faits d'une extrême gravité. L'écrivaine Djaïli Amadou Amal a résumé l'indignation générale par une question percutante : « La vie d'une femme au Cameroun vaut-elle 52 000 F CFA ? ».
Dans les couloirs des tribunaux, cette intervention ministérielle est interprétée comme le début d'une surveillance plus stricte des décisions rendues, particulièrement dans les affaires sensibles ou médiatisées. Le message est clair : les « entorses à l'orthodoxie » ne seront plus tolérées, et les magistrats devront redoubler de rigueur dans l'application des principes fondamentaux de la justice.
Le ministre rappelle également l'importance de la célérité dans le traitement des procédures judiciaires, une exigence déjà soulignée dans plusieurs circulaires antérieures.
-Armand Ougock, correspondant permanent de Koaci au Cameroun.
-Joindre la rédaction camerounaise de Koaci au 237 691154277-oucameroun@koaci.com

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